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Artiste pluridisciplinaire.
Né à Nantua (France) en 1992, vit et travaille à Mons (Belgique)
Dernières expositions (sélection) :
Le langage est omniprésent dans le travail d’Emmanuel Selva (1992). A l’origine de sa visibilité sur la scène artistique, dans le prolongement de son parcours au sein de l’atelier Images dans le milieu de Jean-François Octave à ARTS2- Mons, il y a des agglomérats de toiles, reproductions d’œuvres sur lesquels il apposait des sentences. Le plus souvent, celles-ci renvoyaient à l’idée d’un manque de confiance. D’une stratégie de l’excuse. Dire pardon d’oser être là. D’oser la peinture aussi car c’est aussi de cela dont il est question ici. Une peinture abstraite et langagière. Elle évoque les échecs, les craintes, les tentatives vaines. L’artiste n’est pas un démiurge mais bien un homme qui doute et qui souvent à peur.
Ses toiles se lisent, au départ plus qu’elles ne se regardent. On ri souvent. Mais la nature des propos tord subitement la composition. On est débordé par la peur. On vit une part de l’angoisse qui visiblement accompagne la pratique de l’artiste et probablement plus encore le moment de la monstration. Alors on fait l’expérience de les observer. De découvrir, notamment, le sens aigu des coloris qui les anime.
Au fil des œuvres les toiles s’entremêlent, se superposent. Progressivement cet assemblage hétéroclite devient un tout. Ce qui était une addition d’œuvres se transforme en sculpture ou en ensemble pictural composé d’un ou de plusieurs fragments. Le texte perd en lisibilité même s’il reste présent tel une volonté de maintenir le contact avec les regardeurs. A l’exemple de «Ensemble pictural #6 » où une minuscule toile, tenant sur une baguette, nous dit « Regardez moi », comme une supplique. Les toiles sont pliées, cassées, tordues. Régulièrement de petites reproductions d’œuvres classiques viennent dialoguer par dessus ce torrent de couleur et d’énergie rageuse. Comme un clin d’œil à cette histoire de l’art à laquelle l’artiste souhaite appartenir mais aussi une sorte de référence à un bon goût petit bourgeois. Celui qui s’accapare Caravage au point de, presque, lui ôter son caractère sauvage.
Au sein des productions les plus récentes, il recycle ses propres œuvres. Les découpes, les rassembles en autant de compositions où le langage ne domine plus. Sa présence n’est plus associée à un sens mais presque plus à un bourdonnement. Certaines compositions vont être munies de mécanismes générant un léger bruit et des mouvements. Pour autant leur composition générale elle est fixe. Sa rythmique provient du spectre sonore d’une phrase. Celle-ci complétant le titre de l’œuvre. Ainsi, le langage qui s’était progressivement déconstruit sous-tend la forme même de l’ensemble. Et si après avoir eu si peur de dire (en l’occurrence d’écrire) l’artiste se taisait ? Ou devenait aphone. Les mots sont là mais sont devenus inaudibles, invisibles.
Si la peinture domine actuellement sa pratique, il n’exclu pas pour autant d’autres médiums. Ainsi, et en résonnance évidente avec les travaux récents, il a réalisé une œuvre vidéo intitulée « Ensemble vidéographique #1 les montagnes bougent ». La mécanique de la pièce est la suivante : Il a écrit un texte intime à propos de ses craintes. Il propose à des personnes de sa génération de lire le texte en question. Ensuite, il les filme alors que chacun s’entende dire les mots de l’auteur. Nous en sommes privés du sens la vidéo étant muette. Leurs visages expriment leurs doutes, les écarts ou les superpositions entre leurs pensées et le texte auquel nous n’avons pas accès.
Le travail d’Emmanuel Selva se caractérise par un incessant va et vient entre peinture et sens. Mais surtout entre affirmation et retrait.
Christophe Veys